Dans un futur relativement proche, les B-bots, inventé par un avatar de Steve Jobs, sont des robots connectés numériquement aussi nécessaires aux enfants que ne le sont déjà les smartphones et tablettes. Dans cette utopie (?), la seule victime résiduelle de la fracture numérique est Barney, dont le père s’échine à vendre des vieux gadgets électroniques dont plus personne ne veut. Faute de revenus stables, il ne peut offrir à son fils l’indispensable gadget. Sauf à négocier au rabais un B-bot tombé du camion et défectueux. Baptisé Ron, celui-ci débloque ferme. Mais sa carte mère a retenu l’essentiel de son programme source : rester attaché et être au service de son jeune propriétaire. Cette variante de la trame classique de l’exclusion dans l’hyper-normée société de consommation à l’américaine appartient à ses œuvres faussement critiques que livre régulièrement l’industrie du divertissement.
Les auteurs font mine de railler l'uniformisation galopante des goûts et technologies numériques - ainsi que du totalitarisme numérique qui sommeille. La vision d'une école où tous les enfants possèdent un B-bots - au point qu'un vestiaire connecté leur est destiné - relèverait du cauchemar dans un épisode de la série dystopique Black Mirror.
Même si les jeunes spectateurs n’y verront que du feu à ce film soigné et divertissant, on ne peut s’empêcher de relever cet ironique paradoxe : ce premier film du studio britannique Locksmith Animation est produit sous label 20th Century Studios, qui appartiennent désormais à Disney. Ron débloque emprunte au Big Hero de ce dernier studio une partie de sa trame, tandis que le petit robot ressemble à un cousin tout aussi entêté de l'EVE du film Wall-E de Pixar, également racheté par Disney.
L'ode à l'amitié réelle combinée à la critique d'une société de consommation uniformisée, sous la coupe d'une entreprise monopolistique, en deviennent un brin schizophrènes …
Alain Lorfèvre