C'est l'un des plus beaux films – sinon LE plus beau – de Brian De Palma, c'est un des plus beaux films noirs de ces vingt dernières années , c'est un grand moment de cinéma, une variation assez déchirante sur la solitude, le poids du passé, la trahison, l'impossibilité d'échapper à son destin… La mise en scène de De Palma, inspiré comme rarement, est d'une maîtrise impressionnante, culminant dans deux ou trois séquences d'une virtuosité exceptionnelle. Et pour finir, c'est magnifiquement interprété, Al Pacino et Sean Penn en tête de pont… Bref c'est peu dire qu'on est heureux de la réédition de L'Impasse.
Lorsque Carlo Brigante sort de prison, en 1975, au bout de cinq ans et parce que son avocat a réussi à dénicher un vice de procédure, il a tôt fait de comprendre que les choses ont changé pendant son absence. Le Barrio, le quartier hispanique de New-York sur lequel il régnait, n'est plus ce qu'il était. La reine maintenant, c'est la drogue. Elle a tout chamboulé, tout pourri. Les quelques règles de bonne conduite qui mettaient de l'huile dans les rouages ont volé en éclats. Les cow-boys, les excités font la loi.
Cette nouvelle donne ne fait que conforter Carlito dans son désir de raccrocher, de se ranger des voitures : son idée, c'est d'ailleurs d'en louer des voitures, d'aller ouvrir une petite agence de location aux Bahamas. Mais avant, il faut qu'il se refasse un peu, qu'il économise trois sous. Alors il va travailler comme gérant d'une boîte de nuit qui appartient au milieu, forcément. Mais il est bien décidé à se tenir peinard, à ne pas faire de vague…
Sauf que lorsqu'on s'appelle Carlito Brigante, et qu'on a une réputation de caïd, il est bien difficile de faire un trait sur son passé. Il faut tenir son rang, il faut compter avec ses ennemis, et avec ses amis aussi…
Comme le dit bien le titre original, Carlito's way nous raconte le chemin de cet homme qui veut échapper à son destin, un chemin dont on sait d'entrée qu'il ne le mènera nulle part – De Palma a l'audace, assez folle quand on y pense, de nous livrer le dénouement dès la première séquence du film. C'est beau comme un poème funèbre, c'est fort comme une tragédie.