C’est un cas de figure assez rare : Marion Vernoux s’attaque ici au remake d’un film américain indépendant, un film qu’on avait bien aimé d’ailleurs, sorti discrètement en plein été 2013 : Ma meilleure amie, sa sœur et moi de Lynn Shelton, un trio amoureux un peu paumé, avec un garçon dépressif affublé d’une meilleure amie, qui croise un peu par hasard la sœur a priori lesbienne de la dite meilleure amie lors d’une retraite hivernale sur une île passablement déserte… Marion Vernoux, dont on a présenté il y a deux ans l’excellent Les Beaux jours, chronique du réveil à la vie d’une jeune retraitée incarnée par Fanny Ardant, a respecté assez scrupuleusement le scénario américain mais l’a évidemment adapté à notre géographie nationale.
On se retrouve donc au début du film dans un Brest nocturne, automnal et fatalement pluvieux, lors d’une soirée où l’on rend hommage à un homme prématurément disparu, le frère de Pierrick, lequel frère était l’ancien fiancé de sa meilleure amie, Tessa. Tout le monde y va de son souvenir ému jusqu’à ce que Pierrick casse l’ambiance en présentant son frère comme un fieffé salaud repenti. On découvre ainsi ce personnage brisé et en colère, qui traîne sa déprime avec une bonne dose d’alcoolisme. Face à la situation, Tessa, un tantinet désespérée de l’état de son ami, lui propose de se mettre au vert dans une maison de famille inhabitée sur l’île sauvage de Molène. Faute de mieux, il s’exécute et débarque en plein milieu de la nuit par un temps… comment dire… épouv… breton. Surprise : il découvre derrière la baie vitrée une jolie blonde fort dévêtue, et manque de se ramasser un coup de pagaie par la jeune femme qui a la trouille de sa vie devant cette apparition inattendue. C’est Marie, la sœur de Tessa, qui est venue passer quelques jours à l’improviste après une séparation douloureuse. Une fois la surprise passé, on fait connaissance, on discute, on se rapproche… mais a priori pas de risque de rapprochement inconvenant : Marie est lesbienne. Mais les déterminismes sont fait pour être brisés et arrive bel et bien ce qui ne devait pas arriver. Et tout va se compliquer avec l’arrivée tout à fait imprévue, le lendemain… de Tessa.
On ne vous en dira pas plus sinon que le vrai charme du film tient à son superbe duo d’actrices : Géraldine Nakache, plus que parfaite en fausse bonne copine qui va enfin péter les plombs pour se révéler à elle-même, et Virgine Efira, tout bonnement formidable en fille franc du collier à la vanne assassine. Quant au personnage masculin, incarné par Grégoire Ludig, il est tout à fait savoureux. Dialogues volontiers désopilants et acides, regard aiguisé sur une histoire familiale contrariée, explosion à tout va des préjugés, mise en scène mettant joliment en valeur les paysages sauvages de la Bretagne insulaire : tous les ingrédients sont là pour un moment fort plaisant ma foi.