Tralala

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Tralala, la quarantaine, chanteur dans les rues de Paris, croise un soir une jeune femme qui lui adresse un seul message avant de disparaitre :

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Dans la filmographie buissonnière des Frères Larrieu, Tralala concrétise avec bonheur l’envie de comédie musicale présente sur la pointe des pieds dans Un homme, un vrai, avec Mathieu Amalric (complice indéfectible) et Hélène Filières, dont les quelques moments chantés étaient déjà écrits par Philippe Katerine. Tralala furète joyeusement du côté de Jacques Demy pour l’amour, la légèreté, la filiation, l’errance et le retour aux sources, mais aussi du côté de Vincente Minelli, avec son lyrisme et ses scènes de foule. L’exercice est rare en France et on garde en mémoire les précieux instants des Chansons d’amour de Christophe Honoré, de Jeanne et le garçon formidable du duo Ducastel et Martineau, d’On connaît la chanson d’Alain Resnais… et bien-sûr des films de Demy, déjà cité. Tralala va venir s’ajouter à cette liste de films bienaimés, dont on se souvient en fredonnant…
Tralala est sans domicile fixe, il squatte à Paris dans des logements sur le point d’être détruits. Lunaire et mystérieux, gai et mélancolique, il musarde et arpente les rues avec sa guitare, chantant des mélodies d’une voix lointaine et fragile. Poète, il s’offre à nous en troubadour hirsute et romantique, aux yeux pétillants et profonds.
Ce jour là, Tralala (Amalric) a une apparition : une jeune fille en bleu (Galatéa Bellugi), peut-être est-ce la sainte vierge ? (« Elle m’est apparue vive comme un train flottant, la sainte vierge. Juste devant moi qui me tendait la main, bleue comme une île grecque… »…)
Elle lui adresse un seul message avant de disparaître : « Surtout ne soyez pas vous-même ». Tralala a-t-il rêvé ? Il quitte alors Paris pour Lourdes (soit dit en passant : la ville natale des frères Larrieu), pour retrouver celle dont il est déjà amoureux. Rapidement, il est pris pour un autre, une ancienne tenancière de discothèque (Josiane Balasko) croit reconnaître en lui son propre fils, Pat, disparu il y a vingt ans au cours d’un voyage aux États-Unis. Alors le voilà embarqué avec sa nouvelle famille, et la tribu de sa « vie » : son frère Seb (Bertrand Belin), Jeannie la serveuse (Mélanie Thierry), la bourgeoise hôtelière (Maiwenn), la mystérieuse jeune fille… il accepte alors l’imposture et endosse le rôle du fils revenu d’entre les morts. Dans cette nouvelle peau, il va retrouver le génie qu’il n’a jamais eu et découvrir le plaisir de ne plus « être lui-même ».
On retrouve tout ce qui fait la singularité follement attachante de l’univers des frères Larrieu : leur fantaisie jubilatoire, leur goût du farfelu, leur écriture débordante d’imagination, servie par une troupe d’acteurs épatants, menée par un Amalric solaire, indolent, imprévisible. On se laisse porter par quelques moments de grâce, en apesanteur, tels les deux solos de guitare interprétés par Seb / Bertrand Belin, ou la très belle litanie amoureuse de Mélanie Thierry chantée face à la caméra. Mais à travers cette « tribu » foutraque, Tralala compose une toile d’âmes blessées, d’amours éconduites, de fragiles fidélités soumises à rude épreuve… autant de fêlures qui donnent une belle épaisseur mélancolique à cette foldinguerie musicale.