B.G
Le 26-08-2013
B.G, le 26-08-2013
Pour tout vous dire, nous avions tellement aimé La Merditude des choses, le premier film de Felix van Grœningen, que nous avions bien peur d'être déçus par ce nouvel opus… Aucune déception, bien au contraire : le flamand flamboyant pourrait bien faire partie des réalisateurs qui ont plutôt tendance à se bonifier avec le temps…
Le film commence avec un concert de Bluegrass (variante de musique country, rappelez-vous la folle ambiance du groupe de Georges Clooney dans O'Brother), alors ça swingue, on s'y laisse prendre et l'instant d'après, nous voilà rendus dans une chambre d'hôpital… Allongée sur un lit, une gamine belle à croquer subit une douloureuse prise de sang, entourée de ses parents…
Il aurait été facile à partir de là de tomber dans une forme de sentimentalisme dégoulinant, mais rien de semblable ici.
L'histoire se raconte et repart de zéro, par bribes, retours en arrières, avancées fulgurantes dont on ne saisit pas forcément le sens au premier abord. Mais on se laisse d'emblée entraîner dans ce tourbillon : la science du montage nous livre les clefs au compte-goutte et on reconstitue le tout, bout par bout, car dans la vie rien n'est jamais blanc ou noir, les lignes ne sont jamais droites, et c'est toutes ces nuances que Groeningen nous donne à voir, petit à petit, pour nous laisser le temps de dresser le tableau tout entier.
Tout a commencé par une rencontre : Didier, passionné par les États-Unis, cowboy dans l'âme, joueur de banjo et chanteur dans un groupe de Bluegrass, et Elise, tatoueuse dont le corps est un peu la vitrine de sa boutique et le récit de sa vie. Deux passionnés dont la rencontre débouche inévitablement sur une fulgurante histoire d'amour. Alors tout semble aller très vite et le conte de fée se construit d'abord à deux, puis à trois avec l'arrivée de la petite Maybelle (comme Maybelle Carter, célèbre musicienne et chanteuse country). Mais la réalité n'est pas un conte de fée…
Nous n'en dirons pas plus pour vous laisser le plaisir de la découverte, mais ce film est tout bonnement une petite merveille ! L'ensemble est maîtrisé au millimètre, les personnages sont construits tout en finesse, touchants, profondément humains avec leurs forces, leurs fragilités, les actes de défense mal placés. Tout ça nous est montré simplement, sans jugement, filmé à la « bonne distance ». Il y a une réalité parfois dure, et les personnages tentent de l'affronter comme ils peuvent, avec maladresse souvent, mais en essayant tant bien que mal de s'accorder pour limiter les dégâts.
Tout ça pourrait manquer de légèreté mais ces deux-là sont tellement passionnés qu'on ne peut pas rester indifférent à l'ambiance folle des concerts et de la musique – Elise s'intègre au groupe de Didier et en devient la voix meneuse – qui ponctuent le film et le font décoller : une petite bière autour d'un feu de camp avec les amis musiciens et nous voilà partis à chanter en chœur jusqu'au bout de la nuit !
Alors on rit, on pleure, on espère, mais le titre original du film annonçait bien la couleur : The broken circle breakdown. C'était déjà cassé, c'est juste qu'on ne le savait pas au départ. Alabama Monroe, vous l'aurez compris à présent, n'est pas du tout l’héroïne du film, c'est plutôt le fantasme d'une relation, une image de ce que ça aurait pu être. Mais, dixit Elise dans le film, la vie « ne fait pas ce genre de cadeau ». Malgré ça, le film n'est jamais sinistre, parce qu'il y a de la vie, de l'énergie, de l'amour, beaucoup d'amour… et la musique