Le Moment et la manière

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Anne lutte depuis 14 ans contre une maladie dont elle sait qu'elle ne guérira pas. Elle tente de préparer sa fin de vie, elle qui veut choisir « le moment et la manière » de mourir. Mais, face à une loi qui ne permet pas ce choix, la réalisatrice, une amie de longue date, filme une dépossession. En donnant toute la parole à Anne, le film questionne comment on meurt « mal » en France aujourd'hui et plaide pour que soit enfin reconnu aux malades le droit de choisir « le moment et la manière » de leur mort.
  • Titre original : Le Moment et la manière
  • Fiche mise à jour le 22/10/2014
  • Année de production : 2014
  • Réalisé par : Anne Kunvari
  • Date de sortie : 22 octobre 2014
  • Date de reprise : non renseignée
  • Distributeur France : Iskra
  • Distributeur international : non renseigné
  • Durée : 60 minutes
  • Origine(s) : France
  • Genre(s) : Documentaire
  • Pellicule : couleur
  • Format de projection : 1.77
  • Format son : Dolby 5.1
  • Visa d'exploitation : 140257
  • Indice Bdfci :
    66%
  • 3,2/5
    (8 votes)
    Allociné
    3

Vos commentaires et critiques :

Les deux "Anne"

C’est avant tout une magnifique histoire d’amitié entre deux femmes, à la vie à la mort. Amitié entre deux Anne. Anne Kunvari, c’est la réalisatrice, toujours pétillante, envers et contre tout, même dans les moments où la tristesse devrait l’emporter. Anne Matalon, son amie, est à peu près du même tonneau, une putain de battante. Mais quatorze ans auparavant, la maladie l’a rattrapée, cette saloperie de crabe qui peu à peu a fait de son corps une succession de dysfonctionnements, un puzzle tragicomique d’organes qui foirent les uns après les autres. Et sa vie autrefois bien remplie est devenue une longue succession d’allers retours à l’hôpital avec, conséquence collatérale, l’impossibilité de prévoir à long terme tout projet stimulant.

Mais Anne M a appris à vivre avec. Aux espoirs de rémission a succédé ce que l’on appelle cruellement la chronicité d’un cancer que l’on a fini par ne plus tenter d’éradiquer, mais seulement de stabiliser, la survie succédant peu à peu à la vie. Et elle a fait de sa terrible expérience un combat pour toutes les femmes comme elle qui sont obligées de vivre pendant plusieurs années avec le cancer. Elle a fondé « L’Embellie » , formidable association qui aide les femmes brisées ou mutilées par la maladie à rester femmes, proposant ateliers ou matériels pour que la vie continue presque comme avant.

Et puis la maladie s’est accélérée, et pour Anne K, l’urgence de filmer s’est faite plus pressante, pour témoigner de ce qu’était pour son amie cette vie en pointillé. Et enregistrer ses doutes face aux conditions d’une fin peut être prochaine, Anne M ne souhaitant ni les affres d’une fin douloureuse, ni l’acharnement thérapeutique sous sédation, qui vous enlève toute lucidité avant le grand saut. Anne M aspire simplement à une fin digne et accompagnée. Mais voilà, la loi française, contrairement aux pays voisins (notamment la Belgique ou la Suisse) laisse peu de choix aux malades : la Loi Leonetti reste fermée à tout ce qui pourrait être considéré comme de l’euthanasie active, dans un pays où les lobbys religieux font tout pour que rien n’évolue. Anne M avait envisagé de craquer sa tirelire (cela coûte environ 9000 euros tout de même), et de faire comme certains le voyage en Suisse où vous pouvez passer de vie à trépas dans les meilleures conditions…

Le film remarquable d’Anne K réussit le prodige de parler de la mort inéluctable en nous faisant rire parfois (car les deux amies échangent de bons moments de rigolade même dans les situations a priori désespérées) et en nous rassurant presque sur cette finitude. Car derrière le combat d’Anne M, c’est une formidable leçon de vie que nous recevons. Et évidemment une réflexion qui aboutira peut-être à une loi (promesse numéro 21 du programme du candidat Hollande, j’ai réussi à l’écrire sans rigoler) qui permettrait à chaque personne atteinte d’une maladie définitivement incurable de choisir les conditions les plus dignes possibles pour sa fin de vie.