Hans Detlef Sierck naît à Hambourg le 26 avril 1897. Étudiant, il suit différents cursus (droit, histoire de l’art, philosophie) et découvre au même moment le théâtre, notamment les pièces de Shakespeare qu’il traduira lui-même en allemand. Pour financer l’université, il écrit, comme son père avant lui, des critiques sur l’actualité musicale pour le quotidien Neue Hamburger Zeitung et devient également assistant metteur en scène. En 1922, sa première mise en scène le propulse sur le devant de la scène théâtrale et, l’année suivante, il est nommé premier metteur en scène du prestigieux Schauspielhaus de Brême. Ses choix artistiques modernes lui valent les louanges de ses pairs et un grand succès public. Dès 1930, il est l’un des metteurs en scène allemands les plus respectés. Marié à une femme juive, Sierck subit harcèlements et flatteries : on lui promet des postes importants, en échange de son divorce. Il refuse et se retire progressivement du monde théâtral. En 1934, il se tourne vers le cinéma, milieu, selon lui, plus libéral et libéré. Il rejoint la UFA, le plus important studio allemand de l’époque, où il réalise trois courts-métrages puis son premier long-métrage April, April!, en 1935. Il tournera six autres films pour la UFA jusqu’en 1937 qui posent les fondations d’une œuvre composée de somptueux mélodrames : La Fille des marais, Les Piliers de la Société, La Neuvième symphonie, Du même titre, Paramatta, bagne de femmes et La Habanera. Influencé par sa culture germano-scandinave, aussi bien le cinéma (Sjostrom, Dreyer, Murnau), la littérature (Ibsen, Brecht) que la peinture (impressionnistes danois, maitres flamands), Sierck met sa mise en scène au service des personnages, de leurs passions ou de leurs émois, et des comédiens, iconisant notamment la chanteuse Zarah Leander dans ses deux derniers films allemands. Au tournant de la Seconde Guerre mondiale, Sierck et sa femme fuient l’Allemagne nazie pour les États-Unis, où il deviendra Douglas Sirk. Là-bas, il continue d’explorer les rouages du mélodrame, découvrant notamment les possibilités du Technicolor, et y tourne entre autres Le Secret magnifique (1954), Tout ce que le ciel permet (1955), Écrit sur du vent (1956) ou Mirage de la vie (1959). Bien que grands succès commerciaux, ses films n’acquièrent une réputation critique que plus tard. Jean-Luc Godard et Serge Daney feront notamment ses louanges dans les périodiques français. Sirk demeure une figure majeure du cinéma mondial, influençant aussi bien R.W. Fassbinder, Todd Haynes, Chantal Akerman, Wong Kar- Wai ou encore Pedro Almodóvar..