Avec Les Fraises sauvages, Ingmar Bergman livre un nouveau chef-d’œuvre quelques mois seulement après la sortie du Septième Sceau. Le cinéaste en écrit le scénario en dix semaines, durant sa période de convalescence après une nouvelle hospitalisation pour dépression, cette fois encore liée à une surcharge de travail. Pour interpréter le personnage du médecin Isaac, il fait appel au grand acteur réalisateur Victor Sjöström, l’un des fondateurs du cinéma suédois, que Bergman considère comme un véritable père spirituel artistique. Les Fraises sauvages peut être envisagé comme le premier film du cinéaste à aborder frontalement le thème de la famille, avec un sens du romanesque nouveau chez lui, en montrant l’absence d’amour entre un père et son fils et les conséquences psychologiques qui en découlent. Bien que beaucoup plus âgé que ne l’est Bergman à l’époque du tournage, le personnage d’Isaac Borg n’est pas sans rappeler certains traits de caractère du cinéaste : outre le fait qu’ils partagent les mêmes initiales, ce sont tous deux des hommes ayant choisi de dédier leur existence à leur travail, au détriment de leur vie de famille – à seulement 40 ans, Bergman voit son troisième mariage battre de l’aile. Cependant, le réalisateur parvient à dépasser avec brio la part autobiographique de son œuvre pour décrire le chemin parcouru par un homme à la fin de sa vie, à travers un récit alternant entre rires et larmes, mêlant symbolisme et expressionnisme. Les Fraises sauvages, récompensé par l’Ours d’or au Festival de Berlin en 1958, a élevé son réalisateur au rang de véritable génie du septième art.